Toi mon ombre

 

Depuis maintenant bien longtemps on se connaît,
Toi qui te laisses adopter sitôt que l’on naît.
J’ai joué de ta forme et tes chinoiseries
En m’amusant, étonné, de leurs tromperies.

Puis, tout comme moi tu es devenue bipède.
Glissant, à me côtés, me suis ou me précèdes,
Ne choisis pas du chemin la partie facile,
Reniant ta forme au gré des rencontres hostiles.

Escaladant des murs et sautant des fossés,
Absorbant les cailloux soit par eux embossée,
Tu restes, comprimée, étirée, parfois frêle,
Attachée à mes pas, ma compagne fidèle.

Je ne t’ai connu que des sœurs mais pas de double,
Des cousines floues aussi et d’autres bien troubles.
De la clarté, ta force vient de ton contraire,
Ta franchise n’existe que de source claire.

De ce corps que tu suis, confirmant la présence,
Tu n’existes cependant qu’à cause d’absence.
De la lumière qu’il te prend, es, en échange.
Vivante, dans ce pacte, à sens unique, étrange.

De l’aube blafarde et de ses brumes, tu n’aimes
Ni la timidité ni la faiblesse blême.
Et le grand jour seul permettra que tu surviennes.
Si ta vie y ressemble, elle n’est pas la mienne

Quant lassée de lumière, tu fonds dans la nuit,
Te retrouves-tu ou est-ce là que tu fuis ?
M’as-tu alors quitté ou rejoint ma part sombre ?
Si proche étrangère, qui donc es-tu, mon ombre ?